Salaire des chercheurs au Canada : aperçu et statistiques actuelles
En 2019, les titulaires d’un doctorat en sciences de la santé affichaient un revenu médian nettement supérieur à ceux issus des sciences humaines ou des arts. Cette disparité s’accentuait selon le domaine d’études, même à qualification égale, et persistait après ajustement pour l’ancienneté et le secteur d’emploi.
La pandémie de COVID-19 a modifié ces équilibres salariaux, impactant différemment chaque discipline. Plusieurs programmes traditionnellement considérés comme porteurs ont enregistré des stagnations ou des reculs, tandis que d’autres ont résisté ou progressé, redéfinissant les repères du marché doctoral canadien.
Plan de l'article
- Comprendre la rémunération des chercheurs au Canada avant la pandémie : grandes tendances et chiffres clés
- Quels programmes de doctorat ouvraient les portes aux salaires les plus élevés ? Analyse par domaine d’études
- L’impact de la pandémie sur les salaires des titulaires d’un doctorat : évolutions et enjeux pour le choix de carrière
Comprendre la rémunération des chercheurs au Canada avant la pandémie : grandes tendances et chiffres clés
Les données de Statistique Canada jusqu’en 2024 dressent un portrait nuancé du salaire des chercheurs au Canada. Les dynamiques liées au genre et à l’origine frappent fort, plus que dans bien d’autres secteurs. Au Québec, par exemple, les femmes touchent en moyenne 91 % du salaire horaire des hommes : 32,21 $ contre 35,38 $. Cette avancée, amorcée dès 2005, ne suffit pas à effacer toutes les différences. En 2023, la rémunération hebdomadaire moyenne des femmes plafonne à 82 % de celle des hommes, du fait d’un temps de travail annuel inférieur de 274,5 heures.
Le secteur d’activité joue un rôle clé dans ces écarts. Les chercheuses se retrouvent majoritairement dans les sphères des soins, de l’éducation ou des services sociaux, où le salaire annuel et les conditions d’emploi laissent moins de marge de manœuvre. À l’inverse, la recherche appliquée, notamment en sciences exactes, attire surtout des hommes et propose des rémunérations nettement supérieures.
Du côté des chercheuses immigrantes, la situation se complique encore. Leur salaire horaire moyen s’arrête à 88 % de celui des hommes natifs. Les emplois précaires et les secteurs traditionnellement féminisés, souvent occupés par des femmes immigrantes, entretiennent cet écart.
Voici ce qui ressort de façon concrète :
- L’écart de rémunération femmes-hommes se réduit, mais il demeure tangible.
- Le salaire horaire moyen reste en retrait pour les personnes immigrantes :,4 % par rapport aux natifs.
- Les femmes restent peu nombreuses à accéder aux postes de cadre supérieur.
Malgré des politiques publiques volontaires, le marché du travail canadien conserve des lignes de fracture tenaces. Les chiffres de l’Institut de la statistique du Québec et du Conseil du statut de la femme montrent que les chercheuses, en particulier les plus âgées et les immigrantes, sont davantage exposées aux situations de bas revenu.
Quels programmes de doctorat ouvraient les portes aux salaires les plus élevés ? Analyse par domaine d’études
Les écarts de revenus entre titulaires de doctorat se dessinent dès la sortie de l’université, et le domaine d’études fait toute la différence. Les données récentes du système d’information sur les étudiants postsecondaires mettent en lumière une hiérarchie persistante. Le génie et les sciences de la santé se distinguent largement, offrant aux jeunes diplômés des perspectives salariales bien au-dessus de la moyenne.
Dans le secteur du génie, le salaire annuel moyen trône en haut du classement, soutenu par une forte demande industrielle et la valorisation des compétences techniques. Les diplômés en santé profitent également d’un accès privilégié à des emplois stables, souvent encadrés par des conventions collectives et des grilles salariales évolutives.
À l’opposé, les doctorats en sciences sociales, éducation ou services communautaires mènent le plus souvent à des postes dans le secteur public ou parapublic, où la progression des salaires avance à un rythme plus lent. La forte présence des femmes dans ces filières contribue à l’écart global de rémunération observé entre les genres.
Quelques constats s’imposent :
- Le niveau de scolarité contribue à réduire l’écart femmes-hommes, mais le choix du domaine d’études reste prépondérant.
- Le secteur privé, surtout en génie et technologies, propose les meilleurs salaires d’embauche.
- L’accès aux postes de cadre supérieur demeure difficile pour les femmes, en dehors des sciences appliquées.
Au final, l’orientation choisie au moment du doctorat façonne durablement les trajectoires de revenus, bien au-delà du simple niveau de diplôme.
L’impact de la pandémie sur les salaires des titulaires d’un doctorat : évolutions et enjeux pour le choix de carrière
La pandémie a rebattu les cartes du marché du travail pour les chercheurs au Canada. Certains secteurs, santé, logistique, administration publique, ont vu les salaires progresser et la demande de profils qualifiés grimper. Mais ailleurs, dans la recherche fondamentale, la précarité n’a pas reculé, bien au contraire : gels d’embauche, projets suspendus, incertitudes grandissantes. Les services publics, principaux employeurs de titulaires de doctorat, ont amorti en partie la volatilité du privé grâce à la présence syndicale et à la stabilité des grilles salariales.
L’impact de la pandémie se lit aussi dans l’accentuation de certaines inégalités salariales. La maternité et le partage souvent inégal du congé parental ont creusé, pour de nombreuses femmes, des interruptions de carrière et des écarts de revenus. Les femmes titulaires d’un doctorat restent surreprésentées dans la prise en charge des tâches domestiques non rémunérées, ce qui limite leur disponibilité pour l’emploi salarié, surtout pendant les confinements successifs.
Certaines mesures publiques, comme la Loi sur l’équité salariale ou le Régime québécois d’assurance parentale (RQAP), ont permis d’atténuer certains déséquilibres. Mais la Loi ne s’applique pas aux structures de moins de dix salariés, maintenant des écarts dans des milieux non syndiqués. Désormais, choisir une carrière en recherche implique de composer avec un contexte d’incertitude plus marqué, où la stabilité de l’emploi et l’équilibre vie professionnelle/vie privée prennent une place centrale.
Au Canada, la paie des chercheurs reste le reflet d’arbitrages collectifs et de choix individuels. Pour la génération qui s’apprête à décrocher son doctorat, les chiffres ne sont plus qu’une donnée statistique : ils deviennent la boussole d’un avenir à construire, entre ambitions, contraintes et réalités mouvantes.
